Salut! Je vais essayer de t'expliquer tout ça à travers des exemples pour que tu comprennes mieux
Exemple de principe : la
non-malfaisance, primum non nocere = d'abord ne pas nuire
Exemple de règle :
Si le médecin constate qu’il ne peut soulager la souffrance d’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave ou incurable, quelle qu’en soit la cause, qu’en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie, il peut user d’une antalgie puissante ou même d’une sédation en dernier recours - Loi Léonetti de 2005
(tu peux aussi prendre l'exemple des lois de bioéthique, mais je trouvais que la sédation ça se prêtait bien à l'explication mdrr)Reprenons la phrase qui te pose problème :
JaneEyre a écrit: "cela suppose qu'on ait une règle suffisamment forte pour nous obliger dans la plupart des cas pour réguler l'action sans jamais laisser un cas particulier mais sans être un principe"
Une règle est une
régulation de l'action. Elle oriente l'agir
(bien qu'elle ait un sens moins fort qu'un principe. Tu es d'accord que la non-malfaisance c'est vraiment quelque chose de global et qui s'applique à la médecine toute entière, alors que le fait que la sédation en phase terminale soit autorisée c'est quelque chose de propre à la réanimation, et qui, en plus, est autorisée PARCE QUE cela respecte le principe de non-malfaisance. Le principe est donc + fort que la règle).
Si on crée toujours des cas particuliers à cette règle d'action, c'est quelle ne fonctionne pas : il faudrait refaire les règles du jeu. L'exception ne peut pas faire la règle
(La règle c'est bien "si le médecin estime qu'il ne peut soulager la souffrance (...) il peut user d'une sédation en dernier recours" et pas juste : "Dans le cas d'un cancer, le médecin peut user d'une antalgie puissante en phase terminale", là la règle ne fonctionnerait pas parce qu'on devrait encore rajouter des précisions, par exemple 1) si le patient à une douleur modérée, on n'a pas le droit de réaliser cette sédation ou 2) si le cancer est à un stade terminal, et que la douleur ne passe pas, une sédation peut être envisageable etc....)
Cela suppose qu'on ait un outillage éthique fait :
- de
règles suffisamment fortes pour nous
obliger dans la plupart des cas
(ici la règle sur la sédation doit te permettre de pas laisser le patient mourir de douleur), sans jamais ne laisser de côté les cas particuliers
(elle précise bien "si le médecin constate", autrement dit, bien qu'elle soit globale elle suppose un ajustement au contexte), nous permettant de nous ajuster au mieux
- Sans perdre de vue
les grands axes, les grandes directions, les grands interdits (dans notre cas, l'axe c'est la non-malfaisance : en effet il ne faut pas que l'action du médecin soit malfaisante, c'est pourquoi, même si la sédation en phase terminale est autorisée, il doit y avoir une discussion collégiale qui permette d'être sûr que l'action soit appropriée et qu'elle réponde au principe de non-malfaisance)En bref,
même si l'éthique est d'abord une réflexion, on a quand même certaines règles qui existent, mais on doit obligatoirement les articuler aux grands principes (les principes de Beauchamp & Childress, le respect de la dignité du patient...)
J'espère que c'est un peu + clair pour toi